Niché à 1700m dans l'antre même du Djurdjura, le lac Goulmim qui est en fait non pas un lac mais un étang, reste méconnu du plan grand nombre. Seule une infime partie de Kabyles peut se targuer d'y avoir mis les pieds.
C'est parce qu'il est resté à l'écart de toute entreprise de développement, sans infrastructures, que le site a pu garder toute sa nature éblouissante. Beaucoup d'autres haltes toutes aussi magiques que réelles sont recensées tout au long de l'itinéraire qui relie, à travers d'âpres chemins escarpés, les deux stations de montagne que compte le parc national du Djurdjura que sont Tikjda et Tala-Guilef.
Le lac Goulmim est un vaste plan d'eau naturel rempli d'octobre-novembre à juin. Ensuite, il se vide tout aussi naturellement à la fonte des neiges et surtout en été sous l'effet chauffant des rayons de soleil, laissant ainsi place à une verte prairie. Cette étendue herbacée, pendant la belle saison, accueille de jeunes campeurs venant d'Aït-Bouaddou, qui, pendant deux mois organisent d'incessants tournois de foot-ball .
L'endroit est colonisé à longueur d'année par des rainettes qui lui donnent sa couleur toute particulière. Cette grenouille de la famille des hylidés est connue pour sa capacité à changer rapidement de couleur pour s'adapter à son environnement, mais ce qui est troublant, c'est que normalement elle ne vit que dans les milieux boisés. Doit-on conclure que Tamda u Gelmim était entourée à une certaine époque d'une forêt de pins ou de cèdres?
Rectificatif: Le plan d'eau de Gulmim est bel et bien un lac, jugez-en en lisant le témoignage suivant, qui nous est parvenu :
Dès que nous avons appris l'existence d'un lac au milieu du Djurdjura, il y a des dizaines d'années de cela, nous nous y sommes rendus, mes compagnons et moi. Depuis, nous retournons périodiquement à cet endroit féerique. Je voudrais apporter quelques petites précisions sur le Lac Gulmim. Nous croyons savoir, qu'avant la guerre et grâce à une digue artificielle, le lac était beaucoup plus important et conservait son eau, même en période sèche, on y pratiquait de la barque et de la natation. En juillet et août, durant les années soixante-dix, on pouvait rencontrer dans les environs des hommes flanqués de leur baudets chargés de blocs de glace naturelle puisée dans les avens ("thasrefth" pluriel "thisrafin") aux neiges éternelles, pour la vendre sur les marchés ("souk" pluriel "leswak"),- Précisons qu'à cette époque, il n'y avait pas de réfrigérateurs et beaucoup de villages n'étaient pas électrifiés-. La digue a été détruite, probablement suite à un choix qui devait être tranché entre, d'une part une belle zone de pâturage en plein été et d'autre part une hypothétique réserve d'eau potable, pour alimenter les nappes et faire resurgir d'éventuelles sources inconnues ou carrément la perdre par le phénomène de l'évaporation. Il faut repenser peut être aujourd'hui à stocker et à ralentir cette eau précieuse, furtive, rapide et imprévisible. Le lac "Agoulmime" comme il est inscrit sur les cartes peut contenir facilement à mon avis plus de 2.000.000 de mètres cubes d'eau potable, oui mon ami Ali, c'est un vrai lac pas un étang, qui restera j'espère, ce paradis de l'adorable petite rainette et son énigme.
Voir le schéma du circuit hydraulique simplifié de Haizer et du lac Gulmim.
Renseignements tirés de la Thèse en 1995 de Malek Abdesselam Géologue Ingénieur d'état de l'Institut Algérien du Pétrole pour Obtenir le diplôme de Docteur de l'Université de Franche-Comté en Sciences de la Terre, structure et fonctionnement d'un Karst de montagne sous climat méditerranéen : Exemple du Djurdjura occidental (Grande Kabylie- Algérie)"
Informations sur la rainette: link
Le lac sous une couche de glace. Vidéo de Cherif Amokrane.