Le Djurdjura était, jusqu'à très récemment, orphelin des sports de montagne. Même si des associations et des clubs avaient essayé dès le début des années 80 d'y changer quelque chose, le
manque de moyens, la nouveauté des ambitions et la peur du changement, n'avaient pas permis réellement de lancer et d'asseoir définitivement et durablement les différentes disciplines inhérentes
à la montagne. Seulement, ne l'oublions pas, c'est grâce à ces précurseurs qu'a pu être capitalisée une certaine expérience qui permet aujourd'hui de voir fleurir sur les pentes de nos montagnes,
beaucoup d'adeptes de spéléologie, de ski, d'escalade, des sports de voltige...etc
Longtemps on avait cru, en effet, que les sports de montagne étaient la chasse gardée des seuls occidentaux. Aujourd'hui, nous nous rendons compte qu'il n'y a pas de fatalité en ce domaine comme
en bien d'autres. Des associations se regroupent pour former des ligues régionales qui, à leur tour, s'unissent en fédérations pour le bien de la jeunesse en général et des jeunes montagnards en
particulier.
Mais, car il y a toujours un mais en pareille circonstance, la venue de nombre de jeunes à la pratique des sports de montagne, appellera certainement une fréquentation massive des lieux. Ce qui,
si l'on y prête garde, se répercutera de façon très négative sur l'environnement déjà fragile dans le Djurdjura. Si nous nous réjouissons de la naissance de nouvelles associations, ce qui
est en soi un acte intelligent et responsable, nous ne pouvons nous empêcher d'avoir des appréhensions quant à leur capacité à mettre en place et gérer une relation multiple et un rapport global
à la montagne.
En effet, le manque de formation des responsables et des adhérents peut faire passer comme secondaire le risque de dommages collatéraux, bien réels, conséquence d'une fréquentation assidue du Djurdjura.
Que faire dans ce cas? Commencer déjà par encourager toutes les associations de la région, au delà de leurs caractères respectifs, à se rencontrer de temps en temps, à s'organiser selon leurs affinités dans le but de partager leur expérience et de s'entraider le cas échéant, selon l'expertise que pourrait offrir chacune d'entre-elles. De la rencontre naîtra la réflexion, et de la réflexion naîtront les solutions. Engager des programmes de formation collective, en partenariat et avec l'appui de la Direction du Parc National, est une autre piste à envisager pour réduire à son minimum notre empreinte écologique sur la biodiversité ( la faune, la flore, la géologie, les ressources naturelles...etc). Nous devons savoir, pour ne citer que ces deux exemples, qu'une pierre déplacée volontairement ou pas, est peut-être un habitat détruit qui, rapporté à l'échelle humaine, est le travail de toute une vie! Quelle détresse! Et si parfois, l'on ne peut s'empêcher de cueillir certaines herbes pour leur utilité, il est bon de savoir qu'il y a une façon, un geste, une période pour le faire.
La puissance publique - ou ce qu'il en reste -, de son côté, peut y participer en rendant obligatoire l'adhésion à une association pour tout algérien voulant pratiquer un sport de montagne. Les associations seront ainsi renforcées en nombre et en qualité, ce qui aura pour conséquence de décupler leurs moyens humains et matériels, et les adhérents, quant à eux, évolueront dans des conditions de sécurité absolue. La montagne en souffrira moins et l'Etat ira s'occuper d'autre chose que de réparer les dégâts, souvent irréparables quand ils ne sont pas coûteux. Il est plus que temps que les pouvoirs publics fassent confiance aux citoyens organisés, là où ils ne sont plus capables d'intervenir quotidiennement.
Pratiquer un sport en montagne, c'est, de nos jours, aussi une histoire de moyens. Un individu à lui seul ne peut s'assurer de couverture en matière d'assurance, ni s'offrir tout l'équipement
nécessaire pour ce faire, même si nous savons qu'avant de se permettre une paire de skis de marque DayStar à 800 euros, l'habitant des Alpes a dû, durant de très longues années, tailler dans le
bois de sommaires et inconfortables planches à skier. Pratiquer les sports de montagne dans un cadre associatif, permet donc à tous d'accéder et de partager un matériel et un équipement, souvent
hors de prix.
Développer les sports de montagnes, en plus de donner l'occasion à des passions, nombreuses parmi les jeunes, de s'assouvir et de s'exprimer, permettra de former de futurs spécialistes,
promoteurs et défenseurs de la biodiversité.
Pour cela, commençons par encourager par tous les moyens possibles les sportifs et militants regroupés en associations, en mettant fin aux expériences solitaires et en nous gardant du luxe de
bâtir des terrains de tennis et des piscines en haute altitude.
Ici et là, d'ambitieuses et nouvelles expériences prometteuses sont mises en branle : des jeunes, de plus en plus nombreux, comme à Aït-Ergane ou à Haïzer, armés seulement de leur simple volonté,
sont en train de faire naître l'espoir à travers des sports nouveaux comme l'escalade, le ski, la course en altitude.
Les résultats observés au niveau de ces clubs*, en seulement quelques années d'activité, sont inespérés et très encourageants.
* Club Espoir Aït-Ergane. Commune d'Agouni-Gueghrane- Tizi-Ouzou et Mimouna à Bouira.