-Toi tu me parais sympathique et j'ai confiance en toi, je m'appelle Hemou.
Je ne sais pas si c'est moi qui avais compris soudain le langage des singes ou c'est lui qui connaissait notre langue. Pendant que mes enfants disputaient des fruits avec les siens, nous avons parlé de beaucoup de choses, même des images que je prenais avec ma camera. - Filme ! Filme ! Il se pourrait que dans peu de temps tous disparaissent, ce décor, les arbres et nous, seules ces images resteront. Me dit-il tristement et de poursuivre dans un sursaut :
-Pourras-tu nous obtenir des vidéos de nos cousins d'Alsace ? Et à propos de cousins, puis-je te demander un service ?
-Bien sur, ne suis-je pas ton ami ? Et l'ami de tous les animaux d'ailleurs. Il me tend une lettre à transmettre à Cornélius, son cousin d'Alsace. Il m’a autorisé à vous en donner la teneur, aussi voici cette lettre :
Lettre du Singe de Kabylie au singe d'Alsace.
"Habituellement je ne sais pas écrire, mes lointains ancêtres du Japon : Mizaru, Kikazaru, Iwazaru, me l'ont déconseillé, rappelez vous de la célèbre sagesse ou de l’adage populaire des trois singes : Ne rien voir, ne rien entendre et ne rien dire. "Aujourd'hui c'en est trop, je te lance un appel de détresse à toi mon cousin d'Alsace, qui a réussi à émigrer en France, tu as de la chance d'avoir une montagne toute à toi et qui porte même ton nom. Quelle chance tu as toi, que les hommes de chez toi savent comment t'aimer, en te respectant en te donnant un territoire, que tu occupes seulement depuis quarante ans. Nous ici, ça fait des millions d'années qu'on occupe le Djurdjura et on veut nous exproprier, ces hommes détruisent nos "maisons" quand ils ne les brûlent pas, pour construire : Hôtels, Chalets, stade, routes, *1 Ils viennent jusqu'à nos portes, pour empoisonner nos enfants avec leur nourriture dangereuse, parfois ils les kidnappent pour les vendre ou en faire des attractions dans les places et les souks. Habitués par le nouveau régime alimentaire, nos enfants sont devenus paresseux, ils quittent souvent notre territoire, qui se réduit comme une peau de chagrin pour envahir les potagers et même les maisons des villageois, qui parfois les accueillent avec du plomb. Quand ils sortent en escapades nous sommes angoissés de ne plus les revoir, tu comprends ? Il pourrait leur venir l'idée de faire comme les "Haragas" Tu es un singe comme moi, donc tu peux me comprendre, peux tu m'expliquer les secrets de ta réussite ? Fraternellement "Hemou "
J’ai repensé au geste de civisme des gamins, Sofiane et Ghilas quelques heures plus tôt et je me suis engagé auprès de "Da Hemou", à transmettre son courrier, mais aussi son appel de détresse avant que nous regrettions la disparition des espèces, qui elles, assurent plus ou moins le fragile, sensible et précieux équilibre de la terre. Egalement à soutenir la cause de Da Hemou et de ses congénères avec l'aide de nombreux amis.
*1 Censuré. Avec l'aimable participation de: Abbas Toumert.