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Amis du Djurdjura - ⵉⵎⴻⴷⴷⵓⴽⴰⵍ ⵏ ⵊⴻⵕⵊⴻⵕ

Amis du Djurdjura - ⵉⵎⴻⴷⴷⵓⴽⴰⵍ ⵏ ⵊⴻⵕⵊⴻⵕ

L'homme fait-il partie de la Nature ou bien en est-il le Maître?


Les rapaces dans le Djurdjura.

Publié par A. Moali sur 1 Octobre 2016, 16:50pm

Catégories : #Faune

Image fournie par Tahia Hourria

Image fournie par Tahia Hourria

Dans cet article nous proposons un aperçu de la richesse en Rapaces d'une région montagneuse du centre nord de I'Algérie. C'est un site assez représentatif de I'Atlas Tellien et classé en Parc National depuis 1983. L'existence d'une administration chargée de faire respecter la loi régissant les Parcs Nationaux a montré des bons résultats en dépit des fortes pressions de toutes natures sur les milieux. A ce titre le massif du Djurdjura se prête a ce genre d'études étant donne que son avifaune reste particulière en raison de sa richesse en rupicoles. Par ce dernier qualificatif, on entend les espèces adaptées a la vie dans les zones rupestres, riches en éboulis, en falaises et en formations dégradées a ajoncs qui se maintiennent dans un univers rocheux. Les éboulis proviennent du morcellement des masses rocheuses sous I'influence du froid en hiver et des grandes chaleurs de I'été. Les falaises vont constituer des refuges sécurisants pour les Rapaces alors que les éboulis sont surtout utilisés pour la chasse. Avant de présenter les espèces rencontrées fréquemment dans ces milieux, il serait intéressant de revoir I'agencement des différentes niches écologiques.

 

Le massif du Djurdjura constitue une partie de I'Atlas Tellien. II est caractérisé par un chapelet de pics culminants à plus de 2000 mètres tels que le Ras Timedouine, I'Akouker, le Haizer et le Lala Khedidja. Sa nature géologique est essentiellement calcaire au sommet, le soubassement étant constitué de schistes, gneiss et granites au nord et micaschistes et grès au sud. De part la proximité de la mer d'où provient l'essentiel de I'humidité et de son orientation Est-Ouest, ils s'y forment des climats subhumides sur le versant nord et sub-humides et semi-arides sur le versant sud. On note I'existence de deux saisons principales: I'une qui s'étale de novembre a avril et qui correspond a la période d'enneigement où environ 1 000 mm sont reçus, I'autre plus sèche et plus longue correspond à I'été méditerranéen qui dure de mai a octobre avec seulement 100 mm.

La végétation est du type méditerranéen, caractérisée par un étagement. En partant du sommet de la montagne, on rencontre en premier lieu, les falaises. Dans le Djurdjura, elles sont généralement abruptes et inaccessibles. Sur le sommet, persiste un faible couvert végétal constitué en grande partie de graminées et de quelques buissons. Les étendues sommitales restent le domaine du Moineau soulcie. Les paroies des falaises correspondent aux aires de nidifications du Grand corbeau, du Crave, du Percnoptère, du Vautour fauve, du Pigeon biset et de I'Hirondelle des rochers.

Cette zone est suivie d'une large bande d'éboulis a structure variable:

- Les anciens éboulis stabilisés avec des apports de sol et ou, une faible végétation composée surtout d'ajoncs, permet une certaine activité avifaunistique. Les espèces communément rencontrées sont : la Perdrix gambra, le Merle bleu, le Merle de roche, le Traquet motteux, le Traquet oreillard et la Rubiette de Moussier;

- Les éboulis nouvellement formés, sont quant à eux moins riches et de la sorte, on y rencontre surtout les deux espèces de Merles précédemment citées. Ces zones brièvement décrites ne sont en  en aucun cas séparées d'une manière rigide : elles constituent une mosaïque de milieux qu'on peut rencontrer à la même altitude.

Dans les endroits où la pente est faible et où les masses de sol se sont maintenues, les pelouses sub-alpines apparaissent comme le milieu le plus riche : le Pipit rousseline y niche, la Caille des blés mais presque toutes les espèces citées s'y nourrissent. Ce milieu probablement riche en Insectes et rongeurs attire le Faucon crécerelle, I'Aigle Royal, les Vautours et les Merles. 

Plus bas, c'est le domaine de la Cédraie dans certains endroits et des landes a genêts entrecoupées de taillis de chênes verts dans d'autres. Dans ces biotopes, les Rapaces trouvent les conditions adéquates pour maintenir des populations. Devant le manque d'études de I'importance de ces populations, nous nous arrêterons aux indices: présence ou absence complètes parfois par certaines observations.

 

Dans la région du Djurdjura, les Rapaces rencontrés sont :

1) Les Vautours: lis sont représentés par 3 espèces a statuts différents

Le Vautour fauve: Gyps fulvus

C'est incontestablement le plus fréquent et le plus abondant des vautours dans la région. Vivant en colonies d'une trentaine d'individus chacune, cette organisation sociale lui permet une recherche de la nourriture à moindre coût. D'une grande taille, cet oiseau ne passe pas inaperçu quand on arrive au Djurdjura, il est généralement le premier à souhaiter la bienvenue. Ses populations sont maintenues et bien entretenues grâce a I'apport en nourriture constituée de charognes de bétail. Son domaine vital étant très grand, il s'observe partout dans le massif sauf pendant la période de reproduction où un certain cantonnement est noté. Ce charognard fait des déplacements mais limités qui le conduisent jusque dans les plaines plus basses environnantes.

Le Percnoptère d'Egypte: Neophron percnopterus

Vautour de petite taille, il vit surtout en couple. C'est un oiseau estivant nicheur dans notre région. Les milieux qu'il exploite sont plus nombreux que ceux que fréquente le Vautour fauve. Le Percnoptère se rencontre en basse altitude où il fréquente les décharges d'ordures ménagères. Le nid est fait dans les falaises qu'il rase de son vol silencieux.

Le Gypaète barbu: Gypaetus barbatus

C'est une espèce rare dans le Djurdjura malgré la régularité des observations. Cet oiseau présente actuellement une aire de repartit ion très réduite et des populations très faibles. Les raisons de sa raréfaction peuvent être infraspécifiques ou simplement dues a la dégradation des pâturages qui lui procuraient beaucoup de proies. C'est un grand vautour qui peut entrer en compétition avec le vautour fauve, le Gypaète se nourrissant d'os qu'il casse pour en extraire la moelle mais aussi de cartilage et d'autres parties de la charogne. La concurrence peut concerner d'autres éléments du milieu qu'il serait intéressant d’étudier. 

 
 
 

2) Les Aigles, sont représentes par trois espèces: I'Aigle royal, I'Aigle de Bonneli et I'Aigle botté.

 

L'Aigle royal: Aquila chrysaetos

Oiseau des grandes étendues, chasse sa proie, lièvre et lapins de garenne, perdrix et autres passereaux d'une certaine taille. Actuellement, ses populations semblent connaitre des difficultés, dans le Djurdjura, il reste rare même si son observation est parfois fréquente. La rareté de cette espèce ne peut être comparée a celle du Gypaète. En effet, I'Aigle royal est présent dans le Djurdjura d'une manière effective mais le milieu ne lui permet pas une population importante. C'est le plus grand aigle dans la région; il entre en compétition avec surtout I'Aigle botte qui lui est estivant nicheur mais de taille plus petite. Cet oiseau vit en couple assez fidèle grand domaine de chasse.

 

L'Aigle de Bonneli: Hieraeerus fasciatus

Généralement, oiseau de garrigues et de zones plus ou moins boisées situées en basse ou moyenne altitude, il peut être observe en montagne qui semble pour lui un refuge devant la dégradation et la fréquentation abusive de ses domaines préférés. Dans le Djurdjura, il reste rare en raison des difficultés qui peuvent se présenter quant a la constitution d'une population stable. C'est un oiseau chasseur dans les massifs boisés. La compétition avec I'Aigle royal et I'Aigle botte peuvent être un frein ci sa régularité. Dans le pourtour méditerranéen, ce rapace est non seulement protégé mais fait I'objet de beaucoup de travaux.

 

L'Aigle botté: Hieraetus pennatus

Aigle de la taille d'une buse, il exploite d'ailleurs les mêmes domaines que cette dernière, il est estivant nicheur et fréquent dans les massifs montagneux de la région. Le nid peut être construit dans les falaises mais aussi sur un grand arbre. Les zones rupicoles recouvertes d'une végétation assez éparse restent les domaines privilégiés de ses chasses

 

3) Les Faucons

 

Dans la région, deux espèces sont plus régulières et représentées durant toute l’année: le Faucon crécerelle et le Faucon pèlerin. Le premier apparaît plus abondant et plus ubiquiste alors que le second est d'avantage inféodé aux milieux de montagne. La région reste de même un passage pour les populations migratrices du Faucon hobereau.

 

Le Faucon crécerelle: Faico tinnuculus

C'est le plus fréquent de tous les faucons dans la région, il vit en couple, se reproduit aussi bien en altitude qu'en plaine. Très reconnaissable à son vol sur place et a la barre noire sur le bord des rectrices. La femelle est plus terne que le mâle qui présente une coloration fauve avec des nuances bleutes bien visibles quand un rayon du soleil vient les éclairer alors que I'oiseau effectue des pirouettes.

 

Le Faucon pèlerin: Falcon peregrinus

C'est le faucon le plus menacé dans la région du paléarctique. Cet oiseau souffre de I'utilisation des pesticides dans les traitements en agriculture. Ses populations sont très réduites et il est très intéressant de suivre l'évolution de celles-ci en Afrique du nord. II vole très haut, chasse au vol surtout des Passereaux de taille appréciable. Dans ces régions rocheuses et rupicoles, on note aussi I'existence, avec un statut d'estivant nicheur, de la Buse féroce Buteo ruffinus. Cette espèce affectionne les parties boisées de moyenne altitude où elle niche. Elle se nourrit de rongeurs et de reptiles qu'elle prélève dans les surfaces moins couvertes comme les clairières et exploite aussi les zones de pâturage. On peut ajouter à cette liste la Circaète Circaetus gallicus, visiteur de printemps, cet oiseau est facilement observé dans les zones d'éboulis où il prélève I'essentiel de sa nourriture composée de reptiles. Les Rapaces nocturnes constituent une partie importante de I'avifaune des zones montagneuses même si I'observation dans ces cas reste difficile et donc le contact avec les espèces assez réduit. Elles sont surtout distribuées dans les habitats boisés.

On relève I'existence de deux principales chouettes, la chouette effraye Tyto alba et la chouette chevêche Athene noctua. La chouette hulotte parait plus en montagne.

Les Hiboux sont représentes par le Moyen duc Asio otus plus fréquent, le Petit duc Otus scops, uniquement passager dans les deux sens de sa migration, alors que la présence de I'Ascalaphe Bubo ascalaphus, sous espèce du Grand duc propre a I'Afrique du nord ne peut être qu’effective dans la mesure ou de nombreuses observations le confirment même si celles-ci sont restées verbales et non publiées.

 

 

En conclusion, nous pouvons dire que la classification du Djurdjura en Parc National a permis d’appréhender les relations difficiles entre la protection de la nature et les exigences des populations humaines en espaces exploitables pour le pâturage ou la petite agriculture de montagnes. Des efforts restent encore a déployer afin de mieux connaitre le statut des espèces qui restent toujours menacées de disparition a cause d'une forte pression démographique dans cette région illustrée par les dizaines de villages qui entourent le territoire du Parc. D'autres sources de dangers pour toutes ces espèces restent les projets d’aménagement touristiques ignorant les richesses naturelles du site en se basant uniquement sur les aspects du paysage. A cet effet, la protection des sites qui servent d'aire de reproduction a ces rapaces est plus qu’impérative et est I'affaire de tous. Les régions montagneuses érigées en Parcs Nationaux sont en réalité une aubaine pour le maintien de certaines populations même peu importantes. Les études dans ce domaine peuvent aussi être orientées dans le sens ou elles apporteront des éléments de réponses au statut de chaque espèce mais aussi aux interactions entre elles, interactions d'ordre trophique ou systématique.

 

A. Moali

Laboratoire d'Ecologie des Vertébrés Supérieurs

Institut de Biologie Université de Tizi-Ouzou 15000 ALGERIE

 

Avertissement: Nous avons pris la liberté et la responsabilité de reproduire cet article, in-extension, pour les raisons suivantes:

1- C'est une article de qualité, qui apporte de l'eau à notre moulin pour la défense des milieux naturels du Djurdjura.

2- C'est un article qui mérite une large diffusion, qui participe d'un travail de vulgarisation, pour permettre une connaissance des rapaces de nos montagnes afin de mieux les protéger.

Vidéo réalisée par Hemla DZ

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