Même nos singes ont un jour pris le chemin de l'exil. Involontairement certes, mais exil quand même. Le macaque berbère a été introduit sur le rocher qui surplombe le détroit du même nom depuis au moins 3 siècles selon les historiens. Mais c'est durant la seconde guerre mondiale que le plus important des bandes fut lâché dans un parc, pas loin de la ville. Depuis, il est devenu une attraction touristique qui attire des milliers de personnes chaque année sur ce bout de territoire anglais, situé à l'extrême sud de l'Espagne. C'est l'une des raisons pour laquelle on gère son maintien coûte que coûte. L'autre raison relève de la légende : Il se dit que lorsque le dernier des magots viendrait à périr, le Rocher de Gibraltar reviendrait définitivement au Royaume d'Espagne. Les sujets de sa majesté sont même allés, au début des années 2000, jusqu'à le représenter sur le côté pile d'une pièce de 5 pence dont la face contient une effigie de la reine Elisabeth II. Ne dit-on pas que nul n'est roi en son pays? Mais c'est là une toute autre histoire, car si notre macaque est prince au royaume de Sa Majesté, sa situation n'est pas des plus reluisantes. Gavé de friandises à longueur d'année, il devient obèse. Animal social dans ses contrées d'origine (Algérie et Maroc), il devient individuel, prêt à se bagarrer autour de la nourriture, souvent avec une violence inouïe. L'obésité et la violence sont des phénomènes plutôt rares chez ses cousins du sud, où les singes, malgré tout, gardent, du moins jusqu'à maintenant, leur bonne distance.
C'est du Maroc voisin que sont venus la plupart des ancêtres qui colonisent (200 individus environ) Gibralttar. Le Maroc où le magot continue à être braconné de nos jours encore. Vendu dans les marchés au vu et au su des autorités, il se négocie à 250 Euros en moyenne. Les clients? Ce sont des touristes de toutes nationalités et des expatriés, parce qu'un marocain ne paierait pas cette somme pour un singe sauf à vouloir rentrer lui-même dans un conte populaire. Comment font ensuite ces voyageurs pour les exfiltrer et les ramener dans leurs pays d'origine? Certainement qu'il y a des complaisances mais aussi des négligences, à l'heure où toutes les forces de répression sont mobilisées à traquer des fléaux autrement plus importants (drogue, terrorisme, immigration clandestine,etc), croit-on. L'autre grande menace qui pèse sur le magot au Maroc? La diminution des cédraies (-60% en 50 ans). Si en Algérie ce sont les incendies qui ravagent cet habitat, au Maroc c'est surtout un bois exploité par quelques pontes du Makhzen qui se remplissent les poches à moindres frais. Aujourd'hui, selon des estimations fiables, il ne subsiste que 5000 individus au niveau du Moyen-Atlas.
Lire aussi l'article de Hanane Jazouani http://www.yabiladi.com/articles/details/11625/maroc-demande-acheter-singes-magots.html